LONDON, ENGLAND – JULY 13: Ladies’ Singles Final match during Day Twelve of The Championships – Wimbledon 2019 at All England Lawn Tennis and Croquet Club on July 13, 2019 in London, England.

Il arrive un moment – et le moment est venu pour votre humble serviteur de délaisser son blogue et ses contributions durant les tournois pour ce site Web.  

J’ai lancé ce blogue sur TennisCanada.com il y a dix ans, en janvier 2011, après avoir passé 20 ans, soit de 1990 à 2010, en tant que rédacteur et chroniqueur de tennis au Globe and Mail. La boucle est maintenant bouclée, deux fois.  

Le tennis canadien a beaucoup changé depuis mon premier blogue. Il y a dix ans, un seul Canadien faisait partie du Top 200 de l’ATP – Milos Raonic, 20 ans et 156e mondial.

Chez les femmes, il n’y avait personne dans le Top 100 de la WTA. Rebecca Marino occupait le 104e rang, Aleksandra Wozniak était 125e, Stéphanie Dubois 158e, et Heidi El Tabakh 199e. Aujourd’hui, la championne 2019 des Internationaux des États-Unis, Bianca Andreescu (8e), et la championne junior de Roland-Garros de 2019 Leylah Annie Fernandez (89e) font partie de ce groupe. Avec son 141e rang, Eugenie Bouchard figure aussi dans le Top 200.

Photo: Paul Des Ormeaux

C’est un peu plus relevé du côté masculin, car quatre joueurs sont dans le Top 100 : Denis Shapovalov (12e), Raonic (15e), Félix Auger-Aliassime (21e) et Vasek Pospisil (61e).

Autrefois, ces chiffres auraient été inimaginables. Tout a commencé avec Raonic aux qualifications des Internationaux d’Australie de 2011. Au dernier tour, il a eu raison d’Andrej Martin, 177e. J’étais sur place et j’ai eu pitié du Slovaque de 21 ans. Il avait remporté la première manche et menait par un bris dans la deuxième jusqu’à ce qu’un Raonic, agité et à la mèche courte, parvienne à forcer la tenue d’un jeu décisif. Il a gagné le bris 7-0 et, dans la manche ultime, a totalement surclassé son adversaire pour signer une victoire de 4-6, 7-6(0) et 6-2. Tout d’un coup, Martin n’avait plus aucune chance. Raonic avait rehaussé son jeu, un niveau qui allait bientôt lui permettre de se hisser parmi la crème de l’ATP.

Au tableau principal, il a éliminé Bjorn Phau (85e), Michael Llodra (24e) et Mikhail Youzhny (10e) avant de perdre en quatre manches face à David Ferrer (7e) en huitième de finale.

Raonic and Dennis Novak at 2018 Wimbledon (Photo: Mauricio Paiz)

Raonic a terminé la saison 2011 au 31e rang, puis au 13e en 2012 en route vers la finale de Wimbledon en 2016 et le 3e échelon, son meilleur classement à vie.

Cette même année, Bouchard était demi-finaliste des Internationaux d’Australie et de Roland-Garros, ainsi que finaliste de Wimbledon, et se hissait au 5e rang de la WTA.

Les amateurs de tennis canadien savent ce qui est survenu après les percées de Raonic et de Bouchard — voir la photo ci-dessous.

J’ai eu le privilège d’être témoin des remarquables progrès réalisés par les Canadiens — de Raonic à la jeune Fernandez. J’ai également voyage avec l’équipe canadienne de la Coupe Davis pour assister à des rencontres au Mexique, en Équateur, en Israël, en Serbie, au Japon, en Belgique, en Croatie, en Slovaquie et à Madrid. J’ai également accompagné l’équipe canadienne de la Fed Cup (aujourd’hui la Coupe Billie Jean King) aux Pays-Bas en 2019 et en Suisse en 2020.  

Photo: Mauricio Paiz

Pour un pigiste habitué aux hôtels miteux comme l’établissement deux étoiles à Paris dont le perroquet nommé Oscar dans le hall d’entrée « chantait » les premiers couplets de La Marseillaise, ou encore les motels de Bayside, à Queens, New York, voyager à l’étranger avec l’équipe de la Coupe Davis était du grand luxe. Une chose que j’ai apprise au cours de ces voyages, c’est que les buffets de petits déjeuners sont pratiquement les mêmes dans les meilleurs hôtels du monde entier. Que ce soit à Guayaquil ou à Tokyo, à Tel-Aviv ou à Belgrade, il y a toujours une abondance de fraîcheur et de choix.

Pourtant, rien ne se compare aux matins durant Roland-Garros où je passais par la pâtisserie pour acheter un croissant au beurre que je rapportais pour manger en buvant mon orange pressée et en lisant L’Équipe.

Parmi les moments forts de la Coupe Davis, il y a eu cette rencontre à Toluca, au Mexique, en 2011, où la jeune étoile montante Raonic a été traitée comme une superstar ; Guayaquil où Philip Bester a arraché une victoire cruciale au cinquième match pour permettre au Canada de rêver encore à une place au Groupe mondial, ainsi qu’à Ramat Hasharon, en Israël, où Pospisil a courageusement transporté le Canada sur son dos (deux victoires en simple et une en double dans un stade hostile) pour propulser l’équipe dans le Groupe mondial, un statut qu’elle conservera de 2012 à 2020.

Aujourd’hui, Shapovalov et Auger-Aliassime ont pris la relève et ont continué sur cette voie, comme en témoigne la deuxième place au Canada aux Finales de la Coupe Davis de 2019, à Madrid.  

Je n’ai pas beaucoup voyagé avec l’équipe de la Fed Cup, mais j’étais à Bois-le-Duc, aux Pays-Bas, en 2019, pour voir Andreescu à l’œuvre. Elle était impressionnante. En l’observant derrière le terrain, j’ai été surprise de constater à quel point elle semblait toujours faire le bon choix de jeu.

La sécurité avait été renforcée lorsque le Canada a disputé la rencontre de la Coupe Davis à Guayaquil, en Équateur, en 2011 — avec une forte présence militaire à l’hôtel et des policiers armés de mitrailleuses pour accompagner l’équipe dans ses déplacements quotidiens vers le site de la rencontre. On nous avait bien avertis de ne pas nous éloigner de plus de 10 mètres de l’entrée principale du club hôte, qui se trouvait sur une artère principale très fréquentée menant directement à l’hôtel. À un certain moment pendant les matchs, on a entendu des coups de feu impliquant des gangs rivaux près de l’entrée.  

Après que le Canada ait perdu les deux premiers duels de simple le vendredi soir, j’étais dans le vestiaire vers 23 heures lorsque Daniel Nestor, toujours aussi blagueur, m’a fait signe d’aller lui parler. Il m’a alors dit : « Tom, l’équipe est vraiment déprimée et découragée après ces défaites et a besoin d’inspiration, pourquoi ne rentrerais-tu pas seul à l’hôtel, ce soir ? » Je n’ai pu que sourire et refuser gracieusement. Le Canada a toutefois réussi à remonter la pente et à gagner 3-2 pour atteindre les qualifications pour le Groupe mondial.  

Il y a eu beaucoup de moments forts personnels lors de tournois comme la Coupe Rogers — maintenant l’Omnium Banque Nationale — et d’autres tournois, ainsi que lors des épreuves du Grand Chelem dans le monde entier.

À propos de ces derniers, j’ai assisté à 140 tournois en plus de 45 ans de couverture du tennis. Il y a quelques années, j’avais assisté à 92 épreuves consécutives, mais je n’aurais jamais cru me rendre à 100. Incroyablement, c’est les Internationaux d’Australie de 2020 étaient mon 100e tournoi — de Roland-Garros en 1995 aux Internationaux d’Australie de 2020. Qui aurait pu penser à l’époque que, quelques mois plus tard, une pandémie mettrait fin à cette séquence lorsque Roland-Garros a été remporté à l’automne et que Wimbledon a été annulé ?

En parlant des Grands Chelems, j’ai eu le privilège d’observer trois géants du tennis (photos ci-dessous) au cours des deux dernières décennies, surtout après avoir été témoin, pendant mes premières années, des pitreries de Jimmy Connors, John McEnroe et Ilie Nastase.


Roger Federer (and Ivan Ljubicic) – 2020 Australian Open

Rafael Nadal – 2013 Roland Garros (Photo: Mauricio Paiz)

Novak Djokovic – 2014 Wimbledon (Photo: Mauricio Paiz)

Au fil des ans, j’ai eu le plaisir de travailler et de faire la connaissance de nombreuses personnes chez Tennis Canada. L’une d’entre elles est Michael Downey, président et chef de la direction de l’organisation. Il m’a embauché en décembre 2010, et le moment était parfait, car l’avenir était plutôt sombre pour un chroniqueur pigiste au Globe and Mail. En quelques années, les autres chroniqueurs pigistes — qui couvraient le golf et le curling — ont été remerciés, car les budgets ont été réduits en raison des difficultés croissantes des journaux de ce pays et du monde entier.

Je tiens à saluer tout particulièrement Mauricio Paiz, un ancien joueur de tennis de l’Université de la Floride à Atlanta, qui a apporté une contribution photo et vidéo sensationnelle à TennisCanada.com. Il est jeune, créatif et bien informé et mérite une place parmi les meilleurs photographes de tennis du monde.

Regarder les photos de Mauricio et en choisir quelques-unes parmi ses meilleures — dont plusieurs figurent dans ce blogue — fut un réel plaisir.

Gilles Simon and Raonic – 2014 Roland Garros (Photo: Mauricio Paiz)

Ma réincarnation en blogueur après des années à titre de chroniqueur a présenté un nouveau défi : prendre des photos, surtout avant l’ère Mauricio. Mes photos n’étaient pas les meilleures, mais j’ai trouvé la photographie plus agréable — du moins sur le moment — que la rédaction de certains articles. Il y a un aspect tactile, immédiat, de la photographie qui est tout simplement amusant comparé à la lutte pour donner vie aux mots sur un écran d’ordinateur.  

Les photos font plus facilement ressurgir des souvenirs, comme celle de Pospisil, incroyablement décontracté une heure après ses victoires historiques à Tel-Aviv en 2011.

Bien que l’écriture nécessite une application plus soutenue et plus concentrée, elle reste un témoignage plus complet et plus durable de l’histoire à venir.

Le fait d’être un Trifluvien (originaire de Trois-Rivières, au Québec) et de parler français a souvent été un avantage pour la couverture du tennis. Je me sentais tout à fait à la maison à la Coupe Rogers/Internationaux du Canada à Montréal, tout comme à Roland-Garros, le Grand Chelem auquel j’ai assisté le plus souvent (43 fois).

Cela m’a également permis de collaborer avec le réseau RDS à Montréal pendant 25 ans.

Pour un gars dont le premier tournoi du Grand Chelem a été la dernière édition des Internationaux des États-Unis disputés sur le gazon du West Side Tennis Club de Forest Hills en 1974, et le plus récent au Melbourne Park l’an dernier, j’ai eu beaucoup de chance. Mais il y a aussi eu des périodes difficiles, comme celle où j’ai été le rédacteur en chef de la revue Racquets Canada (1983-84) ainsi que de la publication On Court (1985-1991). Pour donner l’impression que nous étions plusieurs collaborateurs, des pseudonymes apparaissaient souvent sous les titres de mes articles. Les trois principaux étaient Patrick Tolon, mon alter ego, Geoffrey Gales, mon rédacteur de squash, et Mel Buckle, un sportif passionné.

Il y avait également une longue liste d’autres contributeurs fictifs en tête de liste des publications, parmi lesquels Annette Ball, Sidney Vittius, Lotte Angstie et, mon préféré, Les Libideau.

En partant, je n’utilise pas le mot « r******* », car j’espère continuer à contribuer au tennis.

Même si plus de quatre décennies de rédaction de tennis en tant que pigiste n’ont pas été particulièrement lucratives, je n’ai pas à me plaindre. Cela me rappelle un classement douteux (le meilleur rédacteur, Philippe Bouin de L’Équipe, n’y figurait même pas) des chroniqueurs de tennis du monde dans les années 1990 par la publication new-yorkaise Tennis Week. J’étais le 16e sur cette liste et un ami de Toronto a probablement eu la meilleure réaction à l’époque, en disant : « Si tu es 16e, je ne voudrais pas savoir combien d’argent gagne le 17e. »

Il y a une part de vérité dans cette affirmation, mais il est vrai que l’on ne peut pas attribuer une valeur à une vie entière d’expériences inestimables.  

CLIN D’ŒIL DE LA FIN

Saint-Kilda est situé au bord de l’eau (Port Phillip Bay) à environ 20 minutes de train du centre de Melbourne. Ceci est un parc près de la rue Acland où un musicien s’est produit devant quelques spectateurs à cette époque, il y a un an. Mais n’aimerions-nous pas tous y être en ce moment ?

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